Bechyně : pâtisseries et gros raffut - Km 2382

10 septembre, milieu de matinée. Bechyně. La fine pluie qui tombe nous pousse à passer les portes d'un petit "café-pâtisserie" qui nous permettra de nous reposer un peu de la journée éprouvante de la veille. Encore 100 kms au compteur sur un terrain exigeant avec de bons dénivelés. Les paysages restent magnifiques, les points de vues offerts par cette route des crêtes sont à couper le souffle et la Vltava est toujours là pour nous guider, entourée de ses belles et impressionnantes forêts. On la longe parfois de très près, parfois d'un peu plus loin vers l'Ouest, empruntants des sentiers ou des routes qui laissent des traces sur les organismes. Alors, c'est le moment de nous ménager et de prendre un peu de bon temps. Pause en terrasse, sous parasol parant la pluie.


Il faut bien dire que la fin de journée d'hier n'a pas été de tout repos. Depuis Český Krumlov nous étions sereins à l'idée de trouver des endroits pour nous arrêter dormir le soir. Jusque là, la rivière était bordée de "Kemp" ; les kayakistes qui descendent la Vltava en itinérance s'y arrêtent pour faire étape. Forts de cette confiance accompagnée d'un tantinet d'insouciance, on file sur nos bicyclettes sans trop se soucier de l'organisation de notre soirée. Vers 15h, on passe devant un camping. On hésite. Il ne nous plaît pas vraiment avec ses vilains mobil-homes en plastique posés là, gâchant salement le paysage... On décide de poursuivre notre progression, toujours vers le Nord. Les routes sont sans répit, de vrais toboggans. "Up and Down" comme dirait un cycliste local avec lequel on discute sur quelque centaines de mètres. C'est plutôt agréable et on est en bonne forme physique alors ça va... Par contre, plus la moindre trace de camping. Nous roulons pendant un bon bout de temps. Toutes nos batteries se déchargent. Nos téléphones sont fortement mis à contribution depuis qu'on a quitté l'eurovélo 6 : accès aux cartes, tracés gps, recherches...


19h30, la nuit commence à arriver. On a déjà demandé à 4 ou 5 personnes si elles connaissaient une "place to sleep"... sans succès. Les tchèques ne semblent pas très ouverts à accueillir chez eux. Ils nous indiquent des hôtels qui sont tous fermés et ça fait des kilomètres en plus non-recompensés. La région est très rurale et on commence à désespérer. L'ami Google, encore moins finot que les tchèques, nous envoie vers des campings qui eux sont sans doute fermés depuis quelques années. La nuit tombe. On passe dans un village où le bistrot est bien rempli. Un bus vient de repartir laissant descendre une dizaine d'ouvriers qui rentrent du turbin. On se dit qu'on va pouvoir discuter... Depuis notre table, derrière notre Pilsner, on se sent bien observés. Alors on entame la discussion avec deux hommes qui en ont déjà un petit coup dans le cornet. Ils nous donnent des indications qu'on pourrait qualifier de poétiques, évasives, le tout accompagné de gestes chorégraphiques tout à fait grandioses. Ah oui, il faut préciser que dans leur grande majorité, les tchèques ne parlent pas anglais. Ces deux bonhommes ont l'air plutôt sympathiques et nous indiquent un coin où personne ne devrait nous embêter. Tandis qu'on remonte sur nos bicyclettes, ils nous répètent une bonne dizaine de fois l'itinéraire pour être sûrs. Autant créer le dialogue n'est pas forcément simple, autant une fois lancé, il faut savoir l'arrêter. On quitte donc ce village un peu rustre où la bière coule à flot et pas vraiment habitué au passage de touristes. Il fait nuit noire. On passe le pont et à droite, le camping Google où nous étions passé 2h auparavant... dans la forêt, toujours fermé, avec ses chalets en bois et ses herbes hautes. L'endroit n'est pas des plus chaleureux mais fatigués de notre grosse journée, nous y dormons à merveille !


Départ au petit matin. Toujours plus de batterie dans nos téléphones, mon GPS est aussi à plat et notre batterie de secours est vide. On décide alors de retourner vers un village croisé la veille qui semblait un peu plus animé sur les rives de la Moldau. Il est 7h30 quand nous y arrivons et les cafés ici n'ouvrent qu'à 10h... Tant pis, on part après avoir étudié un plan touristique de la région sur un panneau. 


Assez agréable sensation que de prendre nos bicyclettes sans être trop sûrs de nous. On choisit nos routes. On est plus guidés par la rassurante trace GPS. Un peu plus libres encore ? Je sors ma boussole pour vérifier qu'on va bien vers le Nord et on essaie d'avoir toujours la rivière en visu, ce qui n'est pas toujours facile tellement ses rives sont sauvages et escarpées. Quelques gouttes tombent et c'est à ce moment qu'on arrive au village de Bechyně. On se met à l'abri d'une "Cukrana & Gelateria". Nous en profitons pour mettre tous nos appareils à charger. On boit quelques cafés "americano" et dégustons une pâtisserie délicieuse et riche en calories qui contente à merveille nos estomacs. On fait même une partie de ''Punto''. L'ambiance sonore est sacrément bruyante. Des avions de chasse passent sans arrêt au-dessus de nos têtes faisant un raffut incroyable. Camille, s'en allant commander un autre café en profite pour poser des questions à la serveuse. Explication : il y a un camp d'entraînement de l'armée non loin de là. Ça fait bientôt 2h qu'on est là à regarder une fraîche brume tomber sur nos bicyclettes et les avions passent sans arrêt. On aurait pris notre café sur l'herbe d'un virage du circuit des 24h du Mans que ça n'aurait pas été beaucoup moins sonore et pourtant, on se sent bien dans ce charmant petit village. Place centrale avec fontaine, joli clocher et maisons aux coloris pastels. La terrasse vit autour de nous. Les gens sont tranquilles, assez souriants. Nous sommes rassurés par ces visages accueillants. Jusqu'ici, il faut bien le dire, le sourire ne semble pas être la spécialité tchèque. Par contre, notons que ces derniers et dernières semblent apprécier les pâtisseries et les glaces. Deux dames fument en terminant un expresso, d'autres gens mangent. Il ne semble pas y avoir d'horaire défini pour les repas ici.


Il faudrait maintenant qu'on décolle, qu'on poursuive notre avancée. Nous ne sommes pas très motivés à nous élancer sous la pluie. Alors on reste encore un peu au milieu de la vie de ce village et ses impressionnants sons d'avions. 


Vers 12h, le vacarme semble se calmer. Peut-être la pause casse-croûte pour les bidasses aériennes tchèques. Va falloir qu'on y pense nous aussi. Alors nous remontons sur nos bicyclettes et nous nous dirigeons vers une petite supérette repérée en sortie du village pour y faire quelques provisions. Nous nous sommes un peu éloignés de la Moldau et quand on jette un coup d'œil à la carte, nous ne sommes pas très loin - environ 25 kms à l'Ouest - de Tábor.


Nous revoilà donc sur nos vélos avec l'idée en tête de ne pas trop rouler cet après-midi ; de trouver assez tôt un endroit où nous pourrions laver et sécher notre linge et les bonhommes. Nous pourrions profiter de ce temps pour préparer notre arrivée à la capitale : Prague ! Ça va vite venir.


Le temps est toujours couvert mais il ne pleut plus. Il fait un peu frais alors on garde les imperméables qui coupent le vent et on se relance, reposés de cette petite pause matinale au milieu de la vie quotidienne tchèque.

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Commentaires: 2
  • #1

    Cécile OP (mercredi, 16 septembre 2020 18:26)

    Coucou ! Peut-être que les Thèques ont le sourire difficile à venir mais moi en vous lisant je rigole bien de vos aventures. Je vous embrasse avec le sourire !!!

  • #2

    nicole labat (samedi, 19 septembre 2020 17:56)

    je viens de dévorer les articles superbement écrits bravo Julien, c'est un plaisir de suivre vos aventures et d'admirer tous ces paysages grâce aux photos bisous à tous les deux